Mardi 26 novembre 2024, LE GRAND ENTRETIEN reçoit Thierry Mauricet (Directeur général, Première Urgence Internationale)


Première Urgence Internationale : cinq questions à Thierry Mauricet

Face aux crises mondiales croissantes, Première Urgence Internationale intervient pour soutenir les populations civiles en situation de crise. Cette ONG, active sur 4 continents, mobilise ses compétences en santé, eau, hygiène et moyens de subsistance pour répondre aux besoins des plus vulnérables.

Pouvez-vous nous présenter Première Urgence Internationale ?

Première Urgence Internationale est une organisation non gouvernementale de solidarité internationale, à but non lucratif, apolitique et laïque. L’ensemble de son personnel se mobilise au quotidien pour venir en aide aux victimes civiles, marginalisées ou exclues par les effets de conflits armés, de catastrophes naturelles et de situations d’effondrement économique. Le mandat de l’organisation consiste à répondre aux besoins essentiels des populations civiles impactées par les crises et notamment en améliorant leur accès à des services de santé, à l'eau, à l'hygiène et à l’assainissement, mais aussi à des moyens de subsistance.

 A quels enjeux répondez-vous ?

En 2024, on estime qu’environ 300 millions de personnes dans le monde ont besoin d’une assistance et d’une protection humanitaire en raison de conflits armés, de catastrophes naturelles et d’autres facteurs comme des crises économiques. Ces chiffres sont compilés chaque année par le biais des agences des Nations Unies, avec lesquelles nous travaillons pour à la fois recenser les besoins sur la base de nos observations faites sur le terrain et pour contribuer à la réponse globale humanitaire sur les différents théâtres de crise. Les enjeux auxquels nous répondons sont tout simplement liés au fait que les populations civiles impactées par ces crises, n’ont plus les moyens d’assurer leurs besoins essentiels, voire se trouvent dans une situation de survie. Pour répondre à ces besoins 57 milliards de dollars étaient nécessaires en 2023, et pourtant l’effort global n’a permis d’atteindre que seulement un tiers des besoins. 

Où êtes-vous présent à l’international ?

Première Urgence Internationale a des équipes et des programmes sur 4 continents avec une majorité d’entre eux sur le continent africain. Certaines « missions » comme nous les appelons ont été ouvertes assez récemment comme le Togo, le Bénin et le Honduras, d’autres sont plus historiques comme l’Afghanistan où les premiers programmes ont été déployés il y a plus de 40 ans et se poursuivent aujourd’hui.

Avec ce qu’il se passe dans le monde, comment arrivez-vous à gérer ces situations de crise ?

Le nombre de personnes dans le besoin continue d’augmenter d’année en année, les conflits armés s’intensifient et les catastrophes naturelles nous rappellent à quel point notre écosystème est fragile. Parfois c’est aussi la superposition de toutes ces crises sur un même contexte qui rend la tâche plus complexe.

Pour gérer ces situations :

- Nous nous appuyons sur des équipes qui connaissent parfaitement le contexte. La plupart de notre personnel sur le terrain est originaire du pays où l’intervention a lieu. C’est quelque chose d’important car nos collègues connaissent les codes socioculturels, les particularités liées à chaque région, chaque localité.

- Nous faisons appel à des compétences spécifiques : nous avons du personnel médical, des techniciens de l’eau, hygiène et assainissement pour ne citer qu’eux.

- Nous avons également un enjeu de redevabilité assez fort. Une organisation humanitaire doit avoir la capacité de gérer les risques liés au terrain, notamment sécuritaires, mais elle doit aussi assurer une traçabilité de ces actions. Nous comptons une moyenne de 200 projets développés par an, dont la majorité est systématiquement auditée. Nos comptes sont par ailleurs certifiés chaque année par le cabinet Deloitte.

Comment pouvons-nous vous aider ?

Nos équipes constatent que les crises subies s’installent dans le temps, engendrant des besoins humanitaires à la fois urgents et durables toujours plus importants, dans des contextes de couverture médiatique faible voire inexistante. Les levées de fonds pour couvrir ces besoins humanitaires croissants sont donc de plus en plus difficiles. 

Plusieurs formes de soutien sont possibles :

- En contribuant à notre Fonds d’urgence : grâce aux dons collectés nous pouvons déployer rapidement une équipe sur le terrain pour apporter une aide immédiate aux populations exposées aux crises. Ce fonds renforce notre réactivité face aux chocs qu’ils soient liés à un conflit armé ou à un événement climatique.

- En proposant des partenariats opérationnels et financiers : Plusieurs entreprises et fondations nous font confiance. A titre d’exemple la Fondation Air France met à disposition des billets d’avion pour nos collaborateurs déployés sur le terrain, la société CMA CGM propose des solutions de transport maritime pour l’acheminement de certains convois humanitaires. La Fondation Sanofi finance une partie de nos programmes de santé dans différents pays. Nous pouvons également citer un partenariat qui s’est avéré très efficace dans le contexte de la guerre en Ukraine. La société ESRI (Environmental Systems Research Institute), leader mondial dans le domaine des systèmes d’information géographiques (SIG) est venu en appui à Première Urgence Internationale pour prendre en main les outils de la plateforme ArcGIS et à cartographier les localisations de nos actions dans plusieurs villes en Pologne et en Ukraine. Le dispositif a permis également de tracer des itinéraires sûrs entre différentes villes, afin que les membres de l’ONG puissent se déplacer sans risque et aller soutenir les personnes dans le besoin. Le mois dernier, Première Urgence Internationale a reçu le prix du Président d’ESRI France pour cette initiative. Nous souhaitons renforcer ce partenariat sur d’autres contextes.